30e anniversaire de la gestion scolaire
Samedi 20 avril 2024

 

Je n’ai pas lutté pour l’ouverture des premières écoles francophones et je n’ai non plus lutté pour l’obtention de la gestion scolaire…

Mais… certains de mes proches, oui… et, j’étais là…

Je ne prétends pas connaître tous les détails de l’histoire et du travail qui nous ont mené jusqu’à l’obtention de la gestion scolaire mais j’ai une perspective.

À l’âge de 14 ans, le monde tel que je le connaissais a changé à jamais, on m’a présenté devant un carrefour de vie qui m’a lancé sur une trajectoire tout à fait différente que prévue et jusqu’alors inconcevable. À ce moment, je devenais étudiante de 9e année à une toute nouvelle école francophone, la troisième en Alberta, la première à ouvrir ses portes en milieu rural.

Soudainement, j’apprenais en français, toute la journée, dans un environnement complètement en français, mais au-delà de cela, on nous parlait de langue, culture, identité et fierté …dans la même phrase! On nous parlait de droits et revendication, d’injustices et d’assimilation, de défendre et s’affirmer, d’implication et d’engagement, de s’afficher, de prendre notre place…

À travers le réseau jeunesse francophone (FJA) dont je n’avais, jusqu’alors, jamais entendu parler, j’ai découvert la francophonie albertaine. Sans le savoir, j’appartenais à une grande famille avec des centaines, même des milliers, de frères et soeurs… et qu’il y avait à travers la province, toutes sortes de personnes qui portaient le flambeau pour sécuriser un avenir et contribuer à la vitalité de la francophonie albertaine.

J’ai aussi appris qu’il y avait la FPFA, l’ACFA, et multiples groupes de parents chez nous, ailleurs en province et même au pays qui croyaient tellement en la francophonie et en l’éducation francophone. On m’a dit qu’il y avait une charte pour les droits et libertés et là-dedans, l’article 23, que c’était pour nous, et que c’est pour cela que le monde scolaire changeait. J’ai su qu’il y avait un gars, Rodrigue Landry, qu’il parlait du bilinguisme additif plutôt que soustractif. Que le bilinguisme additif, c’était ce que nous offrait, pour la première fois, l’école francophone. Qu’il y avait un commissaire aux langues officielles et pourquoi il existait. Puis qu’on devait exiger nos services fédéraux En Français! Que la commission Laurendeau-Dunton confirmait les ravages de l’assimilation à travers le Canada et le besoin pressant de renverser la situation. Qu’on devait changer cette histoire… Que la bataille était inlassable, ardue et passionnée. Qu’elle était surtout menée par les parents. Que même si on avait des écoles, ce n’était pas assez, fallait pousser plus fort, aller plus loin, que la majorité ne devaient pas décider pour la minorité ce qu’il y avait de mieux pour elle et qu’enfin (et pas si simple que ça), …grâce à la cours suprême du Canada et à l’arrêt Mahé… que les francophones pourraient gérer leurs propres écoles.

J’ai témoigné de proche et de loin le long trajet montagne russes de certains des plus grands leaders francophones de ce temps, et, comme de multiples autres élèves francophones en Alberta, j’ai été récipiendaire et j’ai profité des plus grands succès, et des plus grandes retombées de leur oeuvre. Nous en sommes changés et profondément reconnaissants.

Ce sont eux les héros de cette histoire

Grâce à vous, j’ai pu, comme tant d’autres, pour la première fois, étudier et compléter mes études secondaires à l’école francophone en Alberta. J’ai pu enseigner dans une école francophone, gérée par des francophones. Et comme parent, j’ai pu inscrire mes enfants dans ces écoles. Tout au long de mon parcours j’ai pu et j’ai été inspiré à prendre le flambeau…

Vous avez cru, et nous vous avons vu :

Pionniers. Détenteurs d’une détermination inébranlable.
Architect communautaire. Fort du courage de vos convictions.
Fiers, tenaces et visionnaires.
Bâtisseur d’avenir.
Audacieux gardiens de la francophonie.
À notre profit, vous avez battu des sentiers sur des routes non fréquentées.
Vous nous avez légué un héritage important et précieux

Vous êtes des géants!

Aujourd’hui, moi, mes collègues élus aux conseils scolaires francophone, à travers la province, tous ceux qui vous ont succédé, et tous ceux qui contribuent à l’éducation francophone en Alberta, nous nous tenons sur les épaules de géants.

Nous sommes heureux et fiers de rendre hommage, ce soir, à tous ceux qui ont façonné l’histoire exceptionnelle de l’éducation francophone en Alberta.

Inspiré de la Genèse, qui a bien plus de 30 ans, soucieux du lègue qui nous a été laissé, armés de notre histoire et de nouveaux gains, nous poursuivons cette lutte collective pour maintenir les acquis et revendiquer d’avantage afin d’offrir à tous les élèves francophones à travers la province, un service d’éducation francophone de qualité, en quête pour l’équivalence réelle.

Et, autant bien que vous, nous espérons inspirer les leaders de demain pour les générations à venir…

 

Texte : Sylvianne Maisonneuve
Illustrations : Julie Picard, Creative Coconuts